Fils d'un industriel normand, élevé au beau milieu des machines, Charles Tellier eut rapidement envie d’en inventer. C’est en pleine canicule à Paris qu’il réussit à transmettre à Mr. Haussmann l’un de ses premiers projets. Connaissant les velléités d’innovation du jeune homme, le préfet lui déclare : « C’est le moment de produire de la fraîcheur ».

  

   

    

  

Charles Tellier, sur la conservation des viandes

Du haut de ses 28 ans, le jeune Tellier se penche donc sur la question, en s'appuyant notamment sur des travaux du scientifique britanique Faraday. Dès la mise en place de son premier prototype de machine frigorifique, il perçoit l’intérêt pour la conservation des viandes. Cherchant à financer ses recherches, il apporte un gigot d’agneau à l’Académie des Sciences afin de leur prouver la capacité de conservation pendant un mois, et de susciter l'intérêt.

   

Mais il faudra attendre 1873 et de multiples péripéties pour que son invention soit enfin reconnue par Louis Pasteur. Il n’obtiendra ni prix ni crédits, l’Académie doutant que l'application pratique et industrielle de son outil soit possible. Incroyable sachant qu'aujourdhui nous developpons de multiples techniques comme la surgélation SoBoeuf "Les Beaux Quartiers" pour garder la saveur de nos meilleures viandes de boeuf du monde.

   
Deux ans plus tard, pour démontrer le contraire Charles Tellier veut faire appliquer son procédé au transport de marchandises par bateau. Pour réunir les fonds, il publie une annonce de recherche de financement dans le Figaro. Elle lui permet de réunir les fonds et c'est, en quelque sorte, une opération de crowdfunding avant l'heure.
Cela lui permet d'équiper à ses frais un voilier racheté à Liverpool, avec un système de refroidissement.

  
levée-fonds-le-frigorifique-charles-tellierLa cale frigorifique pour le transport de la viande

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

Le frigorifique va être utilisé pour la première fois lors d’un voyage entre Rouen et Buenos Aires en 1876 après une escale pour avarie à Lisbonne. Navigant entre 6 et 8 noeuds, il mettra 105 jours pour parvenir à destination. La cargaison de viande de boeuf, maintenue par son invention entre 0 et -2°C, arrivera en parfait état le 23 décembre à Buenos Aires. Percevant le fort potentiel de l’invention, la République Argentine ne tarira pas d’éloges lors de  cette nouvelle découverte. Plus de vingt journaux argentins relatent l’aventure dont le National de Buenos-Aires qui titre le 3 janvier 1877 : « Hurrah ! mille fois hurrah ! pour les révolutions de la science et du capital ! L'aurore d'un jour nouveau naît pour La Plata? »

  
A son retour à Rouen, c’est 25 tonnes de viande d’Argentine qui débarquent triomphantes, prouvant ainsi le génie de son créateur. Ce sont les Anglais qui équiperont les navires de ligne réguliers dès 1880. Jugé peu rentable, le frigorifique sera vendu aux enchères en 1881 et servira sur la ligne Bordeaux-Rouen pour le transport du vin. Il coulera le 13 mars 1883 sur la Seine suite à une collision avec un autre navire britannique, en plein brouillard.

  

Comme beaucoup de visionnaires, il ne profitera guère de son invention malgré sa persévérance.
Il mourra dans le plus grand dénuement, en 1913 à 85 ans, sans avoir jamais pu vivre correctement du fruit de ses inventions.

                                                                                     

charles-tellier-le-frigorifiqure-viande-argentine

Portrait de Charles Tellier, inventeur du froid.